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EXCLU – Tennis : Un amateur avec les plus grands joueurs, la folle histoire

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Ancien entraîneur de Stéphane Robert, Gilles Simon ou encore Corentin Moutet, Ronan Lafaix nous a accordé un long entretien pour parler de son nouveau livre « Tu es un champion qui s’ignore ». Dans ce livre, il propose un véritable cheminement intérieur pour aider chacun à révéler le meilleur de soi. Pourtant, rien ne prédestinait cet amateur de tennis aux multiples casquettes, classé au mieux 15/2, à accompagner des champions sur le circuit.

N’en cherchez pas un autre. Préparateur mental, entraîneur de tennis, sophrologue : Ronan Lafaix est tout à la fois. Un personnage au parcours singulier. Classé au mieux 15/2, il a démarré comme entraîneur de club avant de rejoindre l’académie de tennis de Patrick Mouratoglou. Une étape fondatrice, point de départ d’un long chemin qui l’a mené à accompagner plusieurs membres du Top 100, parmi lesquels Stéphane Robert, Gilles Simon ou encore Corentin Moutet. Véritable touche-à-tout – il a également apporté son aide à des skippers et à des golfeurs – Lafaix a, au fil des années et de ses expériences, perfectionné une méthode baptisée « Soyez P.R.O et Osez », conçue pour aider les sportifs à atteindre le plus haut niveau. Dans son nouveau livre «Tu es un champion qui s’ignore», il délivre un message simple : chacun peut réussir. Rencontre avec une voix singulière du tennis français.

«Pour jouer, il faut rester un enfant»

Ton livre s’appelle « Tu es un champion qui s’ignore », qu’est-ce qu’un champion pour toi ?

Un champion c’est quelqu’un qui arrive à exploiter tout ce qu’il a en lui. Qui enlève tous les freins qui pourraient l’empêcher d’optimiser tout ce qu’il sait faire.

Selon toi, tout le monde peut être champion. Comment es-tu arrivé à cette conclusion ?

J’ai eu des difficultés à performer. Et au fur et à mesure, j’ai travaillé sur moi, puis j’ai accompagné des grands joueurs. Donc finalement, quelque part, le champion qui s’ignore, je parle un peu de moi au départ. Avec mon classement à 15/2, je n’aurais jamais pu penser entraîner des joueurs classés 20e mondiaux, jamais de la vie. Et pourtant, c’était le cas. Donc, est-ce qu’on peut dire que « je suis un champion » ? Pour ma part, j’estime que oui.

À qui t’adresses-tu à travers ce livre ?

C’est destiné à ceux qui jouent au tennis, mais je pense que même des personnes extérieures au milieu peuvent le lire et apprendre des choses. Mais j’ai envie de dire un peu à tout le monde, tous ceux qui recherchent la performance. Moi, j’ai l’impression d’expliquer, je parle de philosophie, je parle de sens, je parle de compréhension. Donc, je pense que ça peut parler à plein de gens dans plein de sports différents.

Tu parles beaucoup de ta méthodologie. Tu as mis en place un programme « Soyez P.R.O et Osez ». Est-ce que tu peux nous en parler ?

C’est en 1996, je crois. Je ne sais pas pourquoi, en faisant un entraînement. En fait, j’étais devenu sophrologue. À l’époque, je faisais faire de la sophrologie aux gens quand j’entraînais en club. Je leur demandais d’avoir les deux pieds au sol. En sophrologie, on demande toujours d’avoir les deux pieds au sol et d’être posé. Après, je ne sais pas pourquoi, la respiration est venue. Finalement, j’ai créé « Soyez P.R.O et Osez ». Parce que si je ne comprends pas ce qui se passe dans mon corps, mais aussi dans mon cerveau, je ne peux pas avancer. Et puis après, il y a le « Osez » auquel je tiens beaucoup, c’est « Osez s’abandonner à son inconscient ». Je pense que ça, en France, on n’en parle pas beaucoup. Et moi, j’ai voulu en parler

Tu fais une distinction entre rêve et objectif. Peux-tu nous expliquer ?

L’objectif, c’est quelque chose que je dois atteindre. Un rêve, je ne suis pas obligé de l’atteindre, ce n’est pas grave. Pour moi, le rêve , c’est le plus important. Et aujourd’hui, les adultes ne rêvent plus. Par contre des objectifs, ils en ont à la pelle. La vie est un jeu. En tout cas, c’est la philosophie que je prône. Pour jouer, il faut rester un enfant

Tu es passé par le tennis, la voile, le golf. Est-ce qu’on parle de la même manière à un tennisman qu’à un skipper ?

Tu sais, tu as un être humain en face de toi. Mais puisque je n’ai jamais été à leur niveau, je ne peux pas leur donner de conseils. Donc mon job, c’est un peu comme Socrate. Je l’explique dans le livre, c’est la maïeutique, c’est-à-dire être capable de les faire accoucher des mots qu’ils ont au fond d’eux, de casser des codes pour qu’ils arrivent à se libérer vraiment.

Tu as toujours voulu accompagner des champions, des sportifs de haut niveau ?

J’ai eu envie, j’en ai rêvé. Moi, j’allais voir les matchs, je rêvais de ça. Et puis après, ce sont des concours de circonstances, un joueur qui change de main, qui tout d’un coup monte à -4/6 en quelques années (Guillaume Pichot ndlr), un joueur qui devient champion de France, Patrick Mouratoglou qui m’appelle, j’ai Stéphane Robert, je fais 17 ans avec lui, j’ai Armel Tripon dans la voile, qui gagne la Route du Rhum et fait 11ème au Vendée Globe. Aujourd’hui, je travaille dans le golf. Tout cela a dépassé mes espérances. Je pense que personne n’aurait mis une pièce sur moi, ni sur Stéphane Robert, qui deviendra plus tard 50e mondial.

Peux-tu justement nous parler de Stéphane Robert qui a eu une éclosion tardive. Quel a été le déclic ?

Il est monté assez rapidement 200e mondial. C’est après que ça s’est gâté. Justement, parce qu’il avait des objectifs de classement, il voulait absolument entrer dans le top 100 et ça l’a bloqué. Il me semble qu’à 30 ans, il était 60e mondial. Et puis, il a été rattrapé un peu par ses émotions. Il y est finalement arrivé à 38 ans. On peut dire que c’était lent. Il a aussi souffert d’une hépatite et de quelques petits soucis physiques. Mais lui, il a été dans le top 50. Ce qui a été fabuleux, surtout, c’est que l’on s’est trouvés. Ça matchait grave. Nous n’étions que tous les deux, c’était incroyable.

Tu as aussi travaillé avec Corentin Moutet, travaille-t-on de la même manière avec un Moutet qui a un fort caractère qu’avec un Stéphane Robert ?

Je dirais oui. Je n’ai jamais eu de problème avec Corentin. Il ne s’est jamais mal comporté sur le terrain avec moi. Jamais. Avant de démarrer chaque entraînement, on discutait de philosophie autour d’un thème. On échangeait pendant une heure, et la journée se passait bien.

Ta vision du coaching, c’est être plus dans l’accompagnement que dans le directif ?

J’ai une vision participative. Ce qui m’intéresse, c’est de rendre les gens libres. Ça veut dire les faire réfléchir pour qu’ils trouvent eux-mêmes leur chemin. On est dans un pays où c’est plutôt directif. Je suis à l’encontre de ça. J’ai plutôt une vision horizontale, où on va pouvoir échanger. À partir de mon regard, je vais challenger l’autre pour qu’il trouve sa voie. Parfois, je vais même aller loin, c’est ce que faisait Socrate dans la maïeutique. Je vais pousser un peu pour qu’il aille chercher dans ses retranchements sa vérité.

En France, met-on suffisamment l’accent sur l’aspect mental ?

En France, on aime bien tout séparer. C’est-à-dire qu’il y a un mec qui va faire de la technique, puis l’autre vient pour faire du physique, puis un autre pour le mental. Alors que de mon côté, je pense que le mental est dans le physique. Je pense que le mental est dans la technique. C’est pour ça que je fais des formations dans toute la France, pour intégrer le mental à l’entraînement. Je ne veux pas qu’il soit à part. Mon job d’accompagnant, de coach est plutôt en amont de l’action. C’est quoi le sens de ton entraînement ? En quoi cet entraînement va permettre de te rapprocher de ton rêve ? C’est ce questionnement qu’il faut avoir. Je ne peux pas me concentrer s’il n’y a pas de sens. Donc, on va parler forcément des émotions, du détachement, du calme et de l’estime de soi. Ce sont des thèmes qui me sont chers.

De plus en plus de joueurs et joueuses parlent de leur problème mental, est-ce positif ?

C’est positif et en même temps…Il va falloir qu’il y ait des choses qui changent aussi. Parce que le tennis de compétition est inhumain. Tu es dans l’avion toutes les semaines. Il n’y a pas un autre sport comme ça.

Tu as écrit aussi « Tu es une championne qui s’ignore », un livre cette fois-ci destiné aux filles. Accompagne-t-on une joueuse de la même manière qu’un joueur ?

J’entends souvent dire que les filles ont des émotions et que les garçons n’en ont pas. C’est une grosse connerie. Les joueurs que j’ai eus étaient bourrés d’émotions. Les filles que j’ai eues aussi. Je ne vois pas de différence.

Est-ce que tu pourrais encore entraîner à plein temps ?

Non, je n’ai plus envie. Éventuellement accompagner un projet. Mais je ne veux plus. Je suis allé au bout de mon truc, j’ai senti que c’était le moment, j’étais fatigué. Et puis aujourd’hui, je m’occupe d’un jeune joueur de golf. J’aimerais bien former un champion de golf.

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Cédric

Depuis 1998, je poursuis une introspection constante qui m’a conduit à analyser les mécanismes de l’information, de la manipulation et du pouvoir symbolique. Mon engagement est clair : défendre la vérité, outiller les citoyens, et sécuriser les espaces numériques. Spécialiste en analyse des médias, en enquêtes sensibles et en cybersécurité, je mets mes compétences au service de projets éducatifs et sociaux, via l’association Artia13. On me décrit comme quelqu’un de méthodique, engagé, intuitif et lucide. Je crois profondément qu’une société informée est une société plus libre.

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